Nos sacs sont fin prêts, la maison rangée, les voisins informés et la famille rassurée. Notre porte refermée, la rue pourtant si familière prend soudain un parfum d’aventure tout à fait inhabituel! Passants emmitouflés, femmes voilées, écoliers, gens pressés, la ville se réveille. Vent glacial, bourrasques de neige à l’horizontale! Nous traversons les quartiers nord de… Marseille! C’est le jour du printemps et nous partons pour plusieurs semaines en direction de « loin ».
Première journée de marche, nous voici exfiltrés, échappés, évadés au-delà des collines. Premier bivouac dans la pinède. Parfum de romarin, étoiles, froid piquant, nuit noire, silence. Depuis notre retraite nous avons pris l’habitude, chaque 21 mars, de partir à pied depuis chez nous. Après Lisbonne, Rome, Cracovie, Brest… cette année nous irons en direction de la Hollande!
Dans nos sacs le minimum. Deux fois dix kilos. Une tente trois places, deux duvets bien épais, un réchaud, quelques habits, deux parapluies. Nous mangeons froid et buvons chaud. Régime « spécial chemin », au gré des boulangeries!
Surtout pas une compétition, un challenge, un défi… Plutôt une errance, au fil des semaines, à la rencontre des hommes et des paysages, une sorte de déambulation poétique, contemplative, des grandes vacances, une libération… Pas de tenue moulante fluo. Pas de sponsor, de grande cause. Pas de blog ni de connexion. Juste le ciel, soleil ou pluie, vent et nuages. Pas de montre, seul le soleil pour compter le temps!
Traversée de la Provence, passage du Rhône sur le pont d’Aramont, nous suivons le fleuve vers Lyon, puis la Saône, canal du Centre et de Bourgogne, bords de Seine, canal de la Marne. La Meuse traverse les Ardennes et devient Maas. Maastricht, « le guet sur la Meuse », nous y retrouvons la « FS7 », piste cyclable qui guide nos pas vers Eindhoven, Hertogenbosh, Utrecht, Amsterdam.
Avancer, porter le sac, observer, lire la carte, écouter, dormir au bord du chemin, toilette à une fontaine ou au cimetière, se protéger du ciel, ménager sa santé, profiter de l’instant.
Selon les moments nous sommes randonneurs, voyageurs, marcheurs, touristes, pèlerins, marginaux, on nous traite même de « prophètes »! La police contrôle nos identités… nous prenant pour des migrants!
En deux mois nous croiserons Carine, partie de Reims vers Vézelay, Fernand qui va vers l’Espagne depuis Bruxelles disposant de six mois de liberté. Alors que nous demandons de l’eau pour remplir nos gourdes… on nous invite à partager un thé brûlant, accompagné de petits gâteaux… Imprévu, bonheur du chemin. Odile restera à jamais dans nos cœurs!
Brienne-le-Château, journée repos. Chambre d’hôtel, robinet d’eau chaude, lit confortable, repas à une table, on mange avec des couverts! Fenêtre grande ouverte, parfum d’été, champs de colza à perte de vue.
Cette année la Provence était glacée fin mars. Nous trouvons le beau temps et la canicule en avançant vers le nord! Monde à l’envers, réchauffement climatique, hasard de la météo, bénédiction du ciel?
Marcher au long des sentiers, voies cyclables, chemins de halage, routes pèlerines, anciennes voies ferrées, pistes en forêt… trottoirs!
Mâcon, Reims, Rocroi, Namur, Liège… Banlieues, avenues, places et monuments, marchés, ronds-points… Ronces, friches, zones industrielles ou commerciales, rocades, cités. Villages, champs, vignobles, forêts, fermes, sentiers…
Des canaux, plat pays, foules de cyclistes, maisons flottantes, nous marchons sur la rive de la rivière Amstel. Derniers moments. Après huit semaines de voyage, 50 bivouacs, voici Amsterdam, notre beau rêve d’arrivée!
Laisser un commentaire